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Le roi de Sicile, duc de Pouille et de Calabre

Le roi normand et ses peuples

Malgré l'hétérogénéité de la population, Roger II réussit à maintenir la paix sociale en pratiquant une politique d'équilibre et de tolérance tout à fait exceptionnelle à cette époque et inconcevable ailleurs. Une énumération sommaire des peuples en présence montrent l'extrême bigarrure de la civilisation normanno-sicilienne : Romains, Lombards d'Italie du Sud (Longobardi), Grecs, Arabes et Berbères, Italiens du Nord (Lombardi), Francs, Juifs (très nombreux, mais sans base territoriale), mais aussi quelques minorités sur le continent : Arméniens, Slaves des Balkans, Bulgares…

Chaque peuple se définit par trois éléments : un droit, une religion, une langue qui, ne recouvrant pas toujours l'appartenance ethnique, renforcent la cohérence entre ces groupes divers, fréquemment fortifiée par des mariages mixtes. Cohabitent en effet les droits grec, lombard, romain, normand, franc, nord-italien, musulman sunnite, mosaïque ; les religions chrétienne , de rite grec ou romain, musulmane, adoptée par de nombreux Grecs de Sicile à partir du IXe s., et juive ; enfin les langues latine, grecque et arabe …

En Sicile, état chrétien, l'égalité n'est toutefois pas totale puisque musulmans et juifs sont dotés d'un statut inférieur et contraints de verser un impôt spécifique (djizyab ). Les communautés gardent cependant les institutions indispensables à leur religion et à leur droit. Cet état de fait tient plus à une pratique personnelle du pouvoir, celle du roi Roger, qu'à des institutions. Les premiers signes de désagrégation de cet équilibre commence à se faire sentir dès le règne de Guillaume Ier et surtout durant celui de Guillaume II où ont lieu des pogroms anti-arabes. Les Grecs, eux, disparaissent progressivement des postes administratifs, mais sans violence. L'Islam sicilien et maltais disparaît définitivement sous Frédéric II qui déportent les survivants en Apulie dans les années 1220-1230.

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