6 |
Art et architecture anglo-normands |
La peinture murale
Avec le vitrail, la peinture murale est sans doute lun des arts monumentaux les moins bien représentés dans lart roman normand. Lhistorien et larchéologue savent depuis très longtemps que ces arts de la couleur étaient alors pratiqués en Normandie mais le très petit nombre dexemples recensés ne permettait pas de proposer une vision densemble de la question.
Lattention plus grande portée à la question et certaines découvertes récentes prouvent que, quelle que soit leur taille ou leur statut, lintérieur des édifices religieux était souvent rehaussé de décors peints. La nef de Saint-Jean-le-Thomas (Manche) offre encore des scènes de la Genèse avec en particulier les Offrandes dAbel et de Caïn, le Meurtre dAbel et la Malédiction de Caïn (1ère moitié du XIIe siècle). A la même époque à Norrey-en-Auge (Calvados), le décor figuratif se limite à la travée orientale de la nef, cest à dire la partie la plus proche du sanctuaire reconstruit au XIIIe siècle - mais ces peintures (Adoration des Mages et Entrée du Christ à Jérusalem) ont été recouvertes dès la fin du XIIe siècle comme tout le reste de léglise par du faux-appareil.
La peinture décorative cest à dire non figurative - occupe en effet une place remarquable dans la peinture murale normande tout au long du Moyen Age. Différents fragments retrouvés au Mont-Saint-Michel, à Cerisy-la-Forêt, Caen ou Falaise attestent encore de ces partis décoratifs souvent modestes mais aussi très efficaces tant par leur mise en uvre que par leur effet chromatique.
Les décors de chur sont plus rares car ces parties ont été très souvent remaniées ou reconstruites au cours des siècles suivants. La mise au jour récente de restes des peintures du chur de Manéglise (Seine-Maritime), 2e moitié du XIIe siècle, illustre la richesse iconographique et picturale que pouvaient constituer de tels ensembles. Deux registres historiés superposés surmontaient les fenêtres latérales. LIncrédulité de saint Thomas précède ce qui pourrait être lAscension. Dautres scènes figurées, illustrant probablement des vies de saints, ornaient les voûtes dogives. Bien que fragmentaires, ces peintures appartenaient à un ensemble réalisé en une seule campagne qui se caractérisait par la qualité de son exécution et le chatoiement de ses couleurs saturées (bleu et vert en particulier).
Vincent Juhel