Abruzzes

         

Serramonacesca : Eglise du Saint-Libérateur 
(S. Liberatore alla Maiella)
   

photo : Melo Minnella PalermoL'abbaye du S. Liberator a la Maiella est une maison fille du monastère bénédictin du Mont-Cassin, fondée en 884. Détruite en 990, reconstruite à partir entre 1007 et 1019, elle fait l'objet de travaux de rénovation à l'initiative de l'abbé Didier du Mont-Cassin aux environs de 1080. L'influence du chantier contemporain du Mont-Cassin, sa confrontation avec les réminiscences classiques et l'art développé dans les principautés lombardes d'Italie du Nord, ont donné naissance à un prototype architectural largement diffusé dans les Abruzzes à l'époque normande.

Le corps de l’église comporte trois nefs divisées par des piliers et trois absides alignées. Le plan se lit sur la façade qui comporte un portail central sur la nef et deux portails plus petits ouverts sur les bas-côtés. De même l'élévation à deux niveaux est traduite par les deux registres de décor qui animent la façade : une série de hautes arcatures aveugles sur de fines colonnes, au niveau inférieur, et, dans le registre supérieur, de hauts pilastres plaqués couronnés d'arcatures sur modillons qui divisent le pignon de la nef centrale en trois parties ouvertes sur trois fenêtres à ouverture simple, auxquelles répondent à l'opposé les trois fenêtres de l'abside principale. (De même, un oculus est placé en façade et au chevet sous le faîte de la nef.) Le même motif de bandes lombardes (lésènes) court sur toute la surface des murs de la nef et de l'abside.

Un clocher hors œuvre est accolé au bas-côté sud en avant de la façade. C'est une tour de plan carré, à trois étages nettement divisés par des corniches sur une haute souche dépouillée de tout décor. Chaque étage est au contraire animé de la même frise de petites arcatures sur modillons dans laquelle vient s'insérer une baie unique, double puis triple, l'ouverture des étages progressant avec l'élévation.
Les arcs plein cintre des portails et les corniches sculptées du clocher dénotent la connaissance et l’usage du répertoire d’inspiration classique. Piédroits, linteaux et arcs des portails sont ainsi animés de rinceaux de palmettes et de feuillages. Plus original, le linteau du portail du bas-côté sud porte deux lions affrontés. Les portails sont datés des années 1080 à 1108, au tout début du renouveau roman dans les Abruzzes.

L'élévation de la nef est parfaitement simple et harmonieuse, portée par des piliers rectangulaires à chapiteaux sculptés, et des demi-colonnes au revers de la façade et de part et d'autre de l'abside. Le sanctuaire ne comporte pas de transept saillant, mais s'ouvre par trois arcs plein cintre sur la nef centrale et les bas-côtés, d'une part, et les voûtes en cul-de-four des absides d'autre part. (L'arc triomphal de la nef centrale a disparu.).

La couverture est en charpente apparente. La pierre de taille a été utilisée dans tout l'édifice sauf sur les parties hautes des murs de la nef, en moellons sans enduit. Le seul élément de mobilier est l'ambon introduit dans cet ensemble harmonieux en 1180. Il s'agit d'une tribune carrée sur quatre colonnes ornée de panneaux à motifs animaliers dans un décor de feuillage très finement sculptés.

 

Bibliographie
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Emile Bertaux. - L'art dans l'Italie méridionale. - Paris : De Boccard ; Rome : Ecole Française de Rome, 1968, 3 vol.. (1ère éd. 1903).
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Paolo Favole. - Abruzzes & Molise romans. - La Pierre-Qui-Vire : Zodiaque, 1990, 308 p. (La Nuit des Temps ; 74).
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Mario D'Onofrio. - Il panorama dell'architettura religiosa. - In "I Normanni, popola d'Europa 1030-1200", Roma : Marsilio, 1994, p. 199-209.
- Giovanni Coppola. - L'architecture religieuse normande en Italie méridionale. - In : "Trésors romans d'Italie du Sud et de Sicile", Caen : Musée de Normandie, Toulouse, Musée des Augustins. - Milan : E. Sellino, 1995, p. 75-96.